Histoire
Du Djet Suite, 1963...
1963 L’année de tous les espoirs…
L’année 1963 commence avec le retour tant attendu de Claude BONNET pour seconder son père.
Les deux Djet PS1 et PS3 alternent les démonstrations chez FAIRWAY à Paris ou chez DECROSE en Belgique avec les inévitables reconditionnements chez CHAPPE ou les modifications à CHAMPIGNY.
Il devient évident pour Claude et son père, que le succès remporté par cette voiture éclipse totalement la Le Mans mais qu’elle ne peut pas avoir un débouché commercial viable et rentable dans sa conception actuelle.
La technique du châssis multitubulaire noyé dans le plastique est beaucoup trop délicate, de plus elle est complexe et onéreuse à fabriquer pour une voiture destinée à un usage non strictement réservé à la compétition. A cette époque la grande majorité des voitures de compétition ne se déplaçait pas encore systématiquement sur des remorques ou dans des camions ! Or le Djet n’est pas encore homologué.
Fasciné dés sa sortie par cette voiture, j’essayais par tous les moyens de savoir auprès de René BONNET si il n’y avait pas une solution pour en acquérir une, ne serait-ce qu’en morceaux, et la réponse était toujours la même :
« Tu n’y penses pas…chaque fois que tu monteras sur un trottoir pour te garer, tu reviendras nous voir pour qu’on te refasse les réglages de suspension !… »
J’ai dû attendre 1966 pour avoir enfin le plaisir d’avoir mon Djet ; il était bien abimé, c’est sûr, c’était un châssis poutre, le 1001, le premier à être homologué et il avait servi à tout faire à Champigny : Rallyes, Circuits, essais d’aménagements de carrosseries, de suspensions, d’équipement moteur et boite, d’échappements etc…
La recherche des tubulaires a continué à me passionner et les trois que j’ai récupérés et tous les autres que j’ai retrouvés par la suite dans des états souvent difficilement descriptibles, m’ont permis de me rendre compte de ce que voulait dire René BONNET.
Jacques HUBERT doit encore une fois se remettre à la planche à dessin avec comme objectif d’avoir fini pour hier !
Et le travail est important car c’est une nouvelle voiture qu’il faut concevoir, de la même forme bien sûr, ou peu s’en faut, mais fondamentalement différente.
Une caisse sans châssis est commandée à Chappe, elle sera livrée le 21 Janvier pour mettre au point un châssis poutre, technique bien connue depuis l’époque DB, conception qui se prête plus facilement à une fabrication industrielle.
Il adopte à l’arrière une suspension à triangles superposés, porte moyeu alu, doubles ressorts et doubles amortisseurs très courts, avec tarage spécial pour garder un plancher de coffre plat ; schéma inspiré des toutes nouvelles Jaguar E , évitant l’utilisation de combinés ressort-amortisseur encore inconnus dans les fabrications françaises courantes.
A l’avant une traverse de R8 est modifiée pour retrouver les voies du Djet tubulaire.
Les roues vont passer en 15 pouces résolvant à la fois le problème du coût lié à la fonderie magnésium des roues de 13 , et le ré-usinage toujours délicat des plateaux en 6 goujons. Elles permettent aussi l’adaptation directe des freins à disque, et des porte- moyeux standard de la R8.
Avantage supplémentaire, le diamètre plus important des pneumatiques permet d’atteindre une vitesse de pointe intéressante sans pour autant disposer d’un moteur capable de tourner à 8000 t/mn !
A noter que pour le «Bureau d’études » de René Bonnet, les appellations étaient différentes à cette époque.
Les tubulaires s’appelaient les « petites », les plans portaient la référence CRB1 pour Coach René Bonnet 1er modèle ; le châssis poutre adopta naturellement la référence suivante, c’est à dire CRB 2.
Au point de vue commercial, c’est Claude Bonnet, à ma connaissance, qui insista pour introduire une notion d’évolution dans le sens de la sophistication des voitures, un peu comme les anglais avec Stage 2 puis 3 ou plus et imposa la logique Djet I pour le modèle standard puis II pour la version Hémisphérique et III et IV pour les tubulaires avec hémisphérique ou double arbre.
Cette caisse sans châssis est livrée pratiquement en même temps que le modèle presque définitif des tubulaires (PS4).
Les suivants seront référencés par Chappe à compter du repère 55 .(noté : Rep CG 55 et suivants dans la suite de cette histoire).
Parallèlement à l’étude et la réalisation de ce nouveau Djet, « l’ingénieur » Jacques Hubert fait modifier la barquette pour satisfaire au nouveau règlement édicté par la CSI pour la catégorie « Sport » de l’année 63 .
En plus des cotes minimales imposées pour le pare-brise et la définition de la hauteur dite protégée, ce règlement introduit des dimensions minimales pour les portières (50 x 30 cm).
Jacques Hubert opte pour une transformation de la barquette en coupé avec toit permettant, en utilisant le pare-brise du Djet, de satisfaire cette réglementation et de ne pas trop perdre en aérodynamique.
Le début de l’année 63 voit l’arrivée dans l’équipe de Jean-Pierre BELTOISE qui effectue un début très prometteur sur Missile aux Routes du Nord où, même s’il est contraint à l’abandon, il se montre systématiquement plus rapide que les deux autres Missiles engagés par l’équipe RB.
Aux Etats Unis, Howard Hanna sur Djet (PS2) doit abandonner à la 4ème heure aux 12 Heures Internationales de Floride courues le 23 Mars à Sebring, suite à une rupture du joint de culasse, faiblesse caractéristique des premiers moteurs GORDINI.
Targa Florio mai 1963
Après Sebring, la première épreuve de renommée mondiale en 1963 choisie par René Bonnet pour assurer le développement commercial de ses voitures, sera la Targa Florio disputée sur le circuit des Madonies, en Sicile, le 5 Mai 1963.
Quatre tubulaires neufs vont être préparés pour cette épreuve. Seule nouveauté, l’apparition de persiennes sur les côtés du compartiment moteur mais pour l’instant orientées vers l’avant comme des prises d’air.(à noter que, pour Sebring, Hanna avait, lui aussi, adapté des écopes en bas du caisson moteur, près du passage de roue.)
- Rep CG 55 propriété de Fernand CARPENTIER dont il partagera le volant avec Gérard LAUREAU
- Rep CG 56 propriété de Bruno BASINI qu’il conduira avec Jean VINATIER
- Rep CG 57 propriété de BIGRAT associé pour l’occasion à BOBROWSKI qui a délaissé son Abarth
- Rep CG 58 propriété du fidèle client Roland CHARRIERE qui pour l’occasion aura comme pilote adjoint le « petit jeune » Jean-Pierre BELTOISE .
Les engagements ont été panachés :
Deux voitures Rep CG 55 et 57 équipées du double arbre 1000 cm3 prennent le départ dans la catégorie Prototype moins de 1000 cm3, les deux autres Rep CG 56 et 58 sont dans la catégorie supérieure soit de 1000 à 2000 cm3 et avec leur moteur hémisphérique 1100 cm3 elles vont se retrouver en concurrence directe avec des Porsche et Ferrari 2 litres.
La voiture de Bigrat (Rep CG 57) ne sera finie que quelques jours avant le départ de la Targa à cause d’un moteur posant des problèmes. Bigrat raconte qu’on continuait encore à faire des essais dans l’avenue du Général de Gaulle devant les ateliers de Champigny à 2 heures du matin le jour où il devait la récupérer pour l’envoyer en Sicile.
Bigrat fit partir la remorque à vide chez un ami garagiste de Grasse et il attendit que sa voiture soit enfin prête pour descendre à son volant et retrouver la remorque le lendemain matin pour rattraper le temps perdu et continuer le voyage dans des conditions normales. Autant dire que les essais avaient du être couronnés de succès car à cette époque il n’y avait pas beaucoup de kilomètres d’autoroute construits entre Paris et Grasse. C’est vrai qu’il n’y avait pas non plus de limitations de vitesse…
Sur place aux essais Claude Bobrowski fait le meilleur temps des Djet. Il connaissait déjà ce circuit de 72 km ayant auparavant couru la Targa avec Rosinsky sur Alfa. Mais peut-on vraiment connaître un circuit d’une telle longueur qui doit comporter quelque chose comme 800 virages !
Jean-Pierre Beltoise dont c’était la première compétition en circuit fermé essayait d’apprendre le parcours au volant d’une vieille Chevrolet. Il se rendait compte que la notion de trajectoire idéale comme il en avait l’habitude dans ses compétitions en moto ne lui était d’aucune utilité sur ce tracé.
Il fallait conduire à vue, se tenir au milieu de ces routes bombées dans les rares tronçons de ligne droite et se servir de la pente de la route dans chaque virage. En plus il faut se méfier en permanence des petites bornes en béton qui la bordent de chaque côté, un dérapage mal contrôlé et c’est la casse assurée.
Le Dimanche, deux heures avant la course, un invité de l’équipe (qui ?) chargé d’amener la voiture de Bigrat du Garage où elle avait été garée, jusqu’au circuit, va taper de l’avant gauche un parapet de pont en pierre.
Commencera alors une mémorable partie de mécanique pour changer le radiateur et redonner avec force adhésif une physionomie à peu près présentable à cette voiture pour prendre le départ.
La course ne sera pas une promenade de santé pour l’équipe René BONNET.
C’est d’abord Roland Charriere N°152 qui est contraint à l’abandon, support moteur cassé à l’issue du premier tour, privant Jean-Pierre Beltoise d’une première confrontation internationale.
Gérard Laureau abandonnera lui aussi avec la voiture de Carpentier, N°142, son moteur 2 ACT ayant serré.
Claude Bobrowski sur la deuxième double arbre, N°138, est le mieux placé de l’équipe. Il devance facilement la Fiat Abarth de Hanrioud/Gauvin mais heurte une de ces fameuses bornes après un tête à queue sur la route détrempée par un violent orage qui s’abat sur le circuit alors qu’il parcourait son huitième tour.
Il faut dire qu’effectuer 70 km sous la pluie et sur ces routes est un véritable calvaire, surtout pour lui. Déjà, pendant 30 km, il avait dû se battre pour récupérer une bougie de rechange qui roulait sous ses pieds et qui pouvait à tout moment venir se coincer sous l’accélérateur.
Résultat : une roue cassée, une fusée et une suspension tordues et obligation d’abandonner la voiture sur le côté de la route où elle sera partiellement cannibalisée par des spectateurs amateurs de souvenirs gratuits et authentiques (roues, volant, et différentes bricoles…).
Persuadé d’avoir tout perdu, il rejoindra son hôtel pour se coucher et récupérer après une journée très mal commencée et terminée sans gloire. Il fut littéralement sorti de son lit par un journaliste venu le chercher pour qu’il aille recevoir la coupe récompensant la première place de la catégorie 1000 cm3. Car, malgré son abandon, il avait été quand même classé (en 20 ème position) mais surtout premier de sa catégorie.
Jean Vinatier et Bruno Basini, N°158, obtiennent le meilleur résultat au classement général en terminant à la 17 ème place et finissent troisième de la catégorie 1000 à 2000 cm3.
Jean Vinatier racontait dans quelles conditions inconcevables, il avait terminé l’épreuve.
En effet, à la Targa, dès que le vainqueur de l’épreuve à parcouru ses 10 tours du circuit, les spectateurs considèrent que la course est terminée et de ce fait que la route est de nouveau ouverte, alors que de nombreux concurrents sont encore à essayer de maintenir leur classement et ne lâchent pas la pression.
C’est ainsi qu’il racontait avoir dû doubler dans son dernier tour plus d’une centaine de voitures, en avoir croisé une bonne dizaine et en plus avoir même été obligé de s’arrêter pour laisser manœuvrer un car du service d’ordre qui s’apprêtait à partir..
Nürburgring 9ème course de l’ADAC
Une nouvelle voiture est terminée pour le Nürburgring (Rep CG 59). Elle est engagée par l’usine pour l’équipage Beltoise / Basini qui retrouve à cette occasion Roland Charriere qui fait équipe cette fois avec Robert Bouharde sur la 57 , Fernand Carpentier est la aussi avec sa voiture (55), associé à Pierre Monneret le fils du champion motocycliste Georges Monneret.
Alain Dubourg, propriètaire avec son homonyme Philippe de PS4, est engagé avec Jean-Pierre Manzon, le fils du célèbre coureur de l’équipe Gordini des années 50 .
La barquette modifiée est aux mains de Gérard Laureau auquel s’est joint Jean Vinatier.
René Bonnet est donc représenté pour cette course par deux voitures ‘Usine’: la barquette et le Djet 59, et trois voitures ‘Clients’.
Côté moteur, Dubourg (Numéro de course : 92 ? ), Carpentier (Numéro de course : 86 ) et Charriere (Numéro de course : 88 ), tournent avec des 1108 hémisphériques (54 RG), Carpentier (Numéro de course: 86 ) et Beltoise ( N° 85 ) ont eu droit à un 1000 double arbre (55 RG) de même que la barquette (N° 87 ).
Les résultats des essais dans la catégorie prototype de moins de 1300 cm3 confirment la domination des Abarth mais malheureusement pour René Bonnet ces résultats confirment aussi les performances de l’Alpine M 63 entrevues lors des essais du Mans en Avril.
Bianchi sur Abarth-Simca 1300 annonce la couleur avec un excellent temps de 10’ 07, suivi de Spychiger sur le Spider Abarth 1000 avec 10’ 19. Ce qui n’inquiète pas outre mesure René Bonnet qui sait qu’il y a plus de 40 tours à couvrir pour relier l’arrivée.
Non ce qui l’inquiète c’est le temps de 10’41 obtenu par son ancien pilote José Rosinski sur la M 63 soit vingt secondes de moins que Laureau sur la barquette (11’ 01) pour une motorisation identique. 20 secondes sur 22,8 km c’est 4 km/h moins vite que la moyenne au tour de l’Alpine. En plus, Alpine a fait appel pour partager le volant de la M 63 , aux services du pilote américain Lucky Cassner vainqueur en 61 sur Maserati ‘Birdcage’ avec Masten Grégory et grand connaisseur du circuit.
Bien qu’il ait plu le matin du 19 Mai sur le circuit de l’Eifel, c’est sous le soleil à 9 heures que les concurrents d’élancent dans un départ type ‘ 24 heures du Mans’ devant les innombrables spectateurs venus suivre la course tout au long des 23 kilomètres.
L’Allemand Peter Lindner est le premier à rejoindre sa Jaguar E Coupé N° 66 ‘Light-alloy’ (Light-weight en français !) à la grande joie de ses compatriotes et grâce à son excellente connaissance du Ring garde la tête devant les Ferrari durant un tour complet avant que Scarfiotti et Surtees le passent au volant de leur 250 P
On a logiquement l’Abarth spyder devant l’Alpine M 63 et Beltoise devant le peloton des René Bonnet.
Cet ordre se maintiendra, mais l’écart va se creuser entre l’Abarth et la M 63
Beltoise sur Djet suit respectivement à 40 secondes 56 , 1’ 15 secondes au 4ème mais il est contraint d’abandonner au 5ème tour embrayage et moteur HS. Pas si mal pour sa première épreuve en circuit et pas n’importe lequel !
La barquette reprend la tête des René Bonnet mais Gérard Laureau est intoxiqué par des vapeurs d’essence, première compétition où la barquette court en version fermée. En complément l’embrayage lui donne des soucis et la boîte de vitesse cède à son tour.
A la mi-course, 21ème tour, les berlinettes Simca-Abarth ont toutes abandonné. Mauro Bianchi prend le spyder de Pilette mais peu de temps après, la boîte 6 vitesses casse.
L’Alpine M 63 se retrouve en tête et finit l’épreuve à 119,7 km/h de moyenne avec un meilleur tour effectué à 129,9km/h.
Pierre Monneret abandonne sur sortie de route suspension cassée , Alain Dubourg lui est victime de son embrayage.
Les seuls rescapés furent Charriere et Bouharde qui auront parcouru 37 tours en 7 heures 38 minutes avec leur 1100 hémisphérique, la M63 ayant dans un temps proche (7 heures 37 minutes ) parcouru 40 tours.
Le Mans 1963
Les essais effectués à la soufflerie Breguet de Vélizy du 10 au 12 Avril en même temps que quelques prototypes de la Régie Renault, ont donné des résultats qui vont être utilisés pour les voitures engagées au Mans.
Quatre Djet neufs ( Rep CG 60 à 63) vont être modifiés en tenant compte des résultats obtenus sur la maquette au 3/10°.
De toute façon René Bonnet n’avait pas les moyens de reconstruire une nouvelle barquette. On espérait tout de même que le Djet allait courir en GT.
Hélas, l’homologation n’avait toujours pas été obtenue. Toutes les voitures allaient devoir courir en catégorie Prototype et par conséquent devaient toujours circuler sous immatriculation provisoire LM6.
Le Mans cette année là promettait une affiche extraordinaire. Non seulement par le nombre de marques représentées, mais encore par le nombre de pilotes de renom qui allaient s’y affronter.
Le nombre de demandes d’engagement dépassant les cent voitures, imposait à l’A.C.O. des choix difficiles pour offrir un plateau suffisamment diversifié.
Lors de l’édition 1962, on ne comptait pas moins de 15 Ferrari. Mais l’annonce de la présence de Jaguar, Aston-Martin, Porsche, Chevrolet, Maserati, AC Cobra ainsi qu’une grande inconnue la LOLA animée d’un moteur Ford V8 de 4,7 litres, (derrière laquelle on sentait la présence officieuse du grand constructeur américain) obligeait l’A.C.O. à limiter leur nombre à 8.
Dans les rangs des « petites », la situation était similaire.
René Bonnet, comme Alpine, ne se voient accorder que 3 voitures titulaires : 2 Aérodjet et La barquette modifiée en coupé qui avait participé aux essais d’Avril.
Mais l’écurie Méditerranée, par l’intermédiaire de son président Urbain Fabre, a pu obtenir de son côté, un engagement pour Jean Rolland et Jean-Pierre Manzon pour un autre Aéro double arbre.
Au fil des semaines qui séparent les Essais de la course, les défections se multiplient. L’ASA semble devenir la voiture fantôme, Abarth découvre avec un peu de retard que sa définition du spyder n’est pas en ligne avec le nouveau règlement…
René Bonnet pourra ainsi récupérer une place pour l’Aérodjet inscrit en suppléant sous le Numéro 41.
En résumé :
Barquette N° 54 Moteur 55RG (2ACT) 700 cm3 pour Laureau et Vinatier
AéroDjet N° 53 Moteur 55RG 700 cm3 pour Beltoise Bobrowksi
AéroDjet N° 51 Moteur 55RG 1000cm3 pour Masson et Monneret
AéroDjet N° 41 Moteur 54 RG (hémi) pour Bouharde et Basini
Concurrent Urbain Fabre (Ecurie Méditerranée)
AéroDjet N° 52 Moteur 55 RG 1000 cm3 pour Jean Pierre Manzon et Jean Rolland
Suite aux essais des mercredi et jeudi, deux séries de modifications vont être apportées aux voitures.
La casse d’un des moteurs de 700 cm3 amène l’équipe à installer un double arbre 1000 dans la barquette N°54 et, par mesure de précaution, un hémisphérique 1100 cm3 est monté dans l’Aérodjet N° 53 qui avait fait les essais avec un 700 cm3.
Par ailleurs, les 4 Aérodjet seront équipés de nouveaux réservoirs de plus grande capacité (65 litres au lieu de 55), les voitures n’ayant pas été éligibles en catégorie GT. La catégorie Prototype autorisait une capacité plus importante permettant de diminuer le nombre d’arrêts ravitaillement sur 24 heures.
Le départ est donné cette année dans l’ordre des temps réalisés aux essais.
Pedro Rodriguez auteur du meilleur temps sur sa Ferrari N° 40 à moteur 4L avant est battu dans cette course au démarrage par Phil Hill qui rejoint l’Aston-Martin N°18 plus rapidement.
Mais dés Mulsanne c’est la Maserati N°2 d’André Simon qui prend la tête de l’épreuve forte de ses 4,9 litres de cylindrée.
La Lotus Elite N° 39 de Fergusson / Wagstaff fait connaissance, dès le premier tour aussi, avec le bac à sable de Mulsanne et son pilote doit à grands coups de pelle la désensabler pour reprendre la piste. Et chose incroyable il recommence au tour suivant !!!
Trente minutes s’étaient à peine écoulées que Masson sur l’Aérodjet N°51, voulant sans doute laisser le passage aux voitures de tête qui se rapprochaient, dévie de sa trajectoire en haut de la bosse menant aux « Esses », part en tête à queue et se retourne dans la descente, la voiture glissant sur le toit sur plus de 100 mètres, reste immobilisée au milieu de la piste. Inutile de rappeler qu’il n’y avait ni arceau ni ceinture de sécurité dans la plupart des voitures de course à cette époque.
Par une chance incroyable et le talent des pilotes qui le suivaient, tous les concurrents parviennent à l’éviter. Il est secouru par les commissaires qui le conduisent à l’ambulance couvert de nombreuses blessures heureusement superficielles.
Les commissaires, tous bénévoles rappelons le, réussissent à tirer l’épave sur le bas côté à la force du poignet en s’aidant d’une énorme corde ! On était loin des engins que l’on trouve actuellement le long des circuits.
Aérodjet 51 habilement évité par les autres pilotes
Le classement à la fin de la première heure donnait l’Alpine de Rosinski en 26ème position juste derrière deux Porsche GT 2 litres. Elle précédait la René Bonnet Proto qui se situait alors en 28ème position.
La deuxième Alpine pointait en 32ème position, elle devançait Manzon / Rolland 35ème et Basini / Bouharde classé 36ème.
Beltoise / Bobrowski avec leur hémisphérique devançaient la M63 de Boyer / Verrier.
A 18 heures la M63 N°48 menait toujours devant la Barquette N° 54, l’Aérodjet de Manzon / Rolland, la 41 de Basini / Bouharde et les deux autres M63.
L’Aérodjet de Beltoise avait du s’arrêter au stand suite à une touchette à l’arrière gauche avec une voiture ensablée à Mulsanne car l’équipe craignait une répercussion possible sur la suspension arrière. Elle ne précède plus que les spécialistes du sable, la Lotus et la MG de Hutcheson / Hopkirk
Peu de temps après, deuxième coup dur pour René Bonnet, la barquette conduite par Jean Vinatier tombe en panne sèche sur le circuit.
Impensable ? Absurde et pourtant réel !! Pourquoi une telle erreur sur la voiture de pointe de l’équipe ?
Principale raison, sans doute, le rythme soutenu en début de course pour suivre l’Alpine de Rosinski qui alignait les tours à plus de 170 km/h de moyenne. On avait changé le moteur juste la veille, la cylindrée était passée de 700 à 1000 cm3 soit plus de 40% d’augmentation, ce moteur n’avait pas pu être étalonné en consommation dans de telles conditions.
L’équipe ne pouvait pas non plus attendre de signal précurseur en provenance de l’autre voiture, qui tournait moins vite. Enfin, dernière référence, le deuxième Aérodjet 1000 double arbre avait été détruit en tout début de course.
Peu après 20 heures l’Aston-Martin de Bruce Mac-Laren explose son moteur et lâche ses 14 litres d’huile sur la piste au niveau du virage de la ligne droite des Hunaudières (poste 63), juste après la bosse.
Roy Salvadori son suivant immédiat essaie de freiner mais sa Jaguar se retourne au milieu de la piste et il est éjecté. Il est évité de justesse par l’Aston Zagato de Franc qui part en toupie avant de s’immobiliser.
Arrive alors l’Aérodjet de Manzon qui part dans une série de tonneau interminable avant de se couper en deux et d’éjecter son pilote qui reste étendu au beau milieu de la piste complètement sonné.
Au petit matin Alpine n’a plus q’une survivante, la N° 50, en tête de l’Indice Energétique, elle occupe une excellente onzième place au classement général.
Les deux frères ennemis n’ont plus qu’une voiture chacun !
A mi course, Boyer et Verrier chez Alpine sont en 12ème position et en tête de l’indice Energétique. Chez René Bonnet c’est l’Aérodjet hémisphérique de Beltoise / Bobrowski qui pointe en quatorzième position devant celui de Basini / Bouharde N°41 retardé par une surchauffe moteur due à une rupture de la courroie de pompe à eau.
Inévitablement, le joint de culasse cèdera et malgré une réparation éclair, la distance parcourue ne sera pas suffisante pour être classé officiellement.
Coup de théâtre, en début d’après-midi, l’Alpine N° 50 s’arrête à son stand avec le bruit caractéristique d’une bielle coulée !
Les mécanos se précipitent pour identifier et changer le ou les coussinets touchés en espérant que le vilebrequin n’ait pas été endommagé. La voiture repartira mais sera contrainte à l’abandon peu après.
L’hécatombe avait aussi touché les leaders de l’épreuve. Mairesse qui avait mené la course avec Surtees 15 heures durant sur le Ferrari 3 litres N° 23 avait du abandonner sa voiture en flammes au milieu de la matinée !
Restait l’Aérodjet 53 en course, René Bonnet tenait-il sa revanche malgré la perte de quatre voitures ?
Une course n’est jamais finie tant qu’on n’a pas franchi la ligne d’arrivée. Bobrowski s’arrêtait en panne électrique à la sortie de Mulsanne !!
Un fil avait été coupé par la roue de secours dans le coffre avant et il devait réparer avec les outils disponibles dans la voiture.
Pas d’outils bien sûr…..Bernard Consten qui officiait comme commissaire à cet endroit surveillait sans complaisance qu’aucune aide matérielle ne lui soit fournie…
Claude Bobrowski arrivait à se dépanner avec…..ses dents. Il repartait et remportait l’Indice Energétique de cette 31ème édition des 24 heures du Mans dont les vainqueurs au général avaient pour nom Scarfiotti et Bandini sur Ferrari.
La fin des tubulaires…
Les victoires de Bobrowski au Mans et à la Targa , lui permettent d’envisager un titre de Champion de France.
René Bonnet lui confie L’Aérodjet (ex N°41 du Mans) pour participer la semaine suivante à la course de côte du Mont Ventoux qui se déroule le 23 Juin.
Pendant ce temps, à Champigny, le double arbre récupéré sur la voiture de Masson est monté dans le deuxième Aérodjet (ex N°53 ).
La barquette est remise en état en particulier un effort particulier est accordé à la vérification des trains avant et arrière.
Ces voitures plus celle personnelle de Charriere sont prévues pour disputer une nouvelle compétition Internationale qui doit se dérouler sur le cicuit de Reims le 30 Juin.
Annonçant la renaissance des 12 Heures de Reims, cette épreuve de deux heures va être organisée dans le cadre du Grand Prix de l’A.C.F afin d’essayer de remettre sur pied une épreuve d’endurance destinée aux « Sports et Prototypes » et constituant en quelque sorte une revanche des 24 Heures du Mans.
On retrouvait dans la catégorie « Prototypes plus de 3 litres » une Jaguar E, une Ferrari Testa Rossa, une Aston Martin et une Maserati.
En 3litres : 4GTO, et dans la catégorie 1000 cm3, 4 René Bonnet, 2 Alpine M63 et la DKW.
Gérard Laureau est au volant de l’Expérimentale (nouvelle appellation de la Barquette), Claude Bobrowski est engagé sous le Numéro 66, Pierre Monneret pilote le deuxième Aérodjet avec le Numéro 68, enfin Roland Charriere sur son Djet tubulaire « court » porte le Numéro 70.
Le dimanche, la chaine de distribution du moteur de l’Aérodjet de Bobrowski cassa entre le garage dans Reims où il avait été garé et le circuit.
Très sportivement Roland Charriere lui offrit de prendre le volant de sa propre voiture pour défendre ses chances au championnat de France.
Au terme de l’épreuve Gérard Laureau en terminant dixième était devancé par José Rosinski sur l’Alpine N° 60 mais devançait la N° 62 de Grandsire.
Claude Bobrowski sur la voiture de Charriere terminait 12ème .
Pierre Monneret N° 68, quant à lui avait abandonné, joint de culasse mort, maladie dorénavant habituelle liée aux déformations du bloc moteur Gordini.
Problème que continuait à nier Amédée Gordini qui n’arrivait pas à admettre les faiblesses du bloc moteur Renault monté en double arbre (55RG et dans une moindre mesure 54RG)
Il n’en fallait pas plus pour que plus ou moins rapidement, le phénomène soit irréversible et condamne le moteur…
Renault devra résoudre ce problème plus tard avec le lancement de la R8 Gordini qui sur certains prototypes de présérie en utilisation sévère présentaient les mêmes symptômes.
Il ne restait plus que quelques jours pour être aux essais du circuit d’Auvergne dont l’épreuve se disputait le 7 Juillet.
Trophées d’Auvergne
René Bonnet ne peut présenter que 3 voitures pour cette épreuve.
La barquette pour Gérard Laureau (N°70), un Aérodjet pour Claude Bobrowski (N°72) et le fidèle Roland Charriere sur son Djet tubulaire « court » N°82.
Dans la classe 1000 cm3 derrière l’intouchable Abarth de Mauro BIANCHI, (4’02 aux essais)le duel national continuait entre René Bonnet et Alpine.
José Rosinski dans une M63 modifiée en spyder tournait en 4’ 10, la barquette devant se contenter de 4’ 23, l’Aérodjet tournait en 4’29 et Charriere en 4’32.
Bobrowski se plaignait d’un moteur incapable de dépasser 6000 t/mn !
Rentrant à leur hotel après les essais, Charrière et Laureau éprouvèrent certaines difficultés à doubler une voiture qui occupait le milieu de la chaussée.
Les occupants qui avaient sans doute bien arrosé leur repas forcèrent la René Bonnet à s’arrêter et aidés de plusieurs « amis venus courageusement à la rescousse », attaquèrent les deux pilotes qui rendirent coup pour coup!
Mauvais présage ? Le lendemain, en effet, Gérard Laureau portait un très beau pansement qui lui recouvrait le menton et dès le départ de la course, Abate sur Ferrari provoqua un embouteillage tel que Laureau vint enfoncer l’avant de sa barquette dans une Simca Abarth.
Obligé de s’arrêter durant deux tours pour redresser (en le découpant) son capot avant, il perdra toute chance de se défendre.
La victoire reviendra à Bandini sur Ferrari, alors qu’une Lotus XXIII aurait facilement pu remporter cette épreuve : meilleur temps aux essais de Tony HEGBOURNE qui finit deuxième, Hawkins qui avait mené le début de la course ayant été contraint à l’abandon sur défaillance de boite de vitesses.
Bobrowski aura été encore une fois victime de surchauffe moteur, Charrière victime de sa boite de vitesse.
Djet enfin homologué…
Le Djet à châssis poutre a enfin été homologué après avoir obtenu une dérogation pour la hauteur des phares !!
Le Djet 1001 prototype de la série type CRB1 est homologué .L’enregistrement est signé le 5 Juin 1963.
Les premières immatriculations auront lieu en Juillet.
René Bonnet arrête la fabrication des tubulaires chez Chappe et Gessalin par lettre datée du 17 Juillet 1963.
La production totale estimée de voitures aura été de :
3 Prototypes en 62 de présérie
12 Tubulaires type Djet III / IV de Janvier à Juillet 63 dont 4 Aérodjet.
Soit 15 Voitures complètes.
Auxquelles il convient d’ajouter deux caisses complètes avec châssis restées chez Chappe ou à Champigny et une caisse nue ayant servie à la construction du châssis poutre.
Le Mans 1964…
Pour cette année René Bonnet a pu obtenir quatre engagements, AeroDjet N° 52 en catégorie GT, le N°48 , N°55 et N°56 en Prototype, mais gràce au désistement d’Abarth un aérodjet de réserve a pu être enrôlé le N°60 également en prototype.
En résumé :
Aerodjet GT N° 52 Moteur Gordini S4 1108 cm3 pour Farjon et Lelong (VIN 1162)
AéroDjet Prototype N° 48 Moteur 55RG 1149 cm3 Bouharde et Bourbon Parme (VIN 1149)
RB 1000 Prototype N° 55 Moteur 55RG 1149 cm3 pour Beltoise et Laureau
AéroDjet Prototype N° 56 Moteur Gordini S4 1100 cm3 pour Monneret et Rudaz (VIN 1158)
AéroDjet Prototype N° 60 Moteur 55 RG 1149 cm3 pour Basini et Charrière (VIN 1150)
Désormais les véhicules sont tous homologués et ont donc leur propre immatriculation. Cependant ils ne viennent pas par la route comme il était fréquent à l’époque mais en camion transporteur, un beau chargement Bleu Cascade!! (cf. photos).
Sitôt descendu les véhicules partent pour la pesée avant que de pouvoir participer aux essais. La concurrence avec Alpine va être sérieuse car ils ont également 5 voitures équipées des mêmes motorisations !
Stand René Bonnet
Le Mans 1964 avant le départ
A noter la modification du règlement qui cette année là impose trois feux de position sur les toits au dessus du pare brise.
Les essais vont rapidement confirmer ces craintes car en catégorie GT la N°52 fait 1 seconde de plus que l’Alpine M63 N°51 !
En catégorie Prototype c’est malheureusement relativement similaire, seule l’aérodjet RB 1000 N°55 reste dans les même temps que les Alpines Prototypes (N°46,N°47, N°59 et N°59 les autres aérodjet sont de 4 à 8 secondes moins rapides !!
Avec de tels résultat les Bonnet se retrouvent reléguées aux dernières places du classement des qualifications, or ce classement détermine la position de départ…
Après avoir évité les accidents du premier tour à Indianapolis et Mulsanne la course se déroule sans trop de soucis mécanique contrairement à Alpine qui rencontre beacoup de problème avec les boites de vitesses. Toutefois à la 6ème heure sans crier gare la N° 60 casse son moteur au cours du 45ème tour. L’inquiétude monte chez Bonnet !
Aérodjet N°52 Arrêt au stand
Le Mans 1964
Les deux frères jumeaux les aérodjet N°55 et N°56 sont équipés du même moteur et ont tourné sur des temps similaires et présentent donc naturellement le même risque moteur !
Beltoise et Laureau ont même fait une moyenne de 175Km/H presque 10 KM/H de plus que le N°60 et seront donc les suivants ! 1h plus tard à la 7ème heure de course après 54 tours c’est également une casse moteur.
Quelques minutes plus tard c’est l’aérodjet N°55 qui s’arrête à sont tour doucement….pas de casse moteur…c’est la pompe à essence qui fait défaut.
Consternation, en seulement 7 heures de temps, 3 voitures ont abandoné…Ne restent que Le N° 48 et N°52.
A la 18ème heure c’est le N°48 qui s’arrête sur problème de boite de vitesses ! Le N° 52 quant à lui finira la course à la 22ème place après 260 tours à 157Km/H de moyenne. L’Alpine N°46 M64 (17ème place) remporte l’indice énergétique.
Cette contre performance sportive s’additionne aux soucis financiers qui pèsent lourdement sur René Bonnet automobiles. Le Djet René Bonnet se vend mal (198 exemplaires) ce qui le mènera dans quelques mois à une association quelque peu forcée avec Matra Sports….la suite de l’aventure en compétition ne passera pas ou si peu par le Djet.
Texte de Gérard SCHERER regrété membre du club RBMS
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